Qu’est-ce que le brevet unitaire ?
Le système existant du brevet européen permet depuis 40 ans l’obtention d’un brevet à travers une procédure unique conduite devant l’Office Européen des Brevets (OEB).
UN SYSTÈME ACTUEL PERFORMANT MAIS FRAGMENTÉ
Si la qualité de ce système est reconnue mondialement, une critique ancienne est son coût important, lié à sa fragmentation. En effet, après sa délivrance, le brevet européen se transforme en un faisceau de brevets nationaux. Un titulaire confronté à une contrefaçon dans plusieurs pays devra introduire une pluralité d’actions judiciaires, avec des chances de succès différentes.
LE BREVET EUROPÉEN À EFFET UNITAIRE (BU)
Fruit de la coopération renforcée3, le Règlement (UE) 1257/2012 crée le BU. Il assure une protection uniforme et produit des effets identiques dans tous les États membres participants. Il ne peut être limité, transféré, révoqué ou s’éteindre qu’à l’égard de l’ensemble de ces derniers.
Une seule taxe annuelle de maintien en vigueur sera due à l’OEB. Le montant n’est pas fixé à ce jour, mais les modèles discutés envisagent un coût correspondant à une portée géographique moyenne équivalent aux 4 ou 5 Etats les plus demandés.
Le Règlement (UE) 1260/2012 abolit les traductions pour le BU en s’appuyant sur des traductions automatiques. Toutefois, pendant une période transitoire, un BU délivré en anglais devra être traduit dans une autre langue de l’UE ; un BU délivré en français ou allemand devra être traduit en anglais.
UNE JURIDICTION EUROPÉENNE SPÉCIALISÉE
Un aspect majeur du nouveau système est la création de la JUB. Elle comprend des Divisions Centrale, locales et Régionales. La Division Centrale est divisée en trois sections (à Paris, Munich et Londres) compétentes selon les domaines techniques. Le Luxembourg a choisi de ne pas créer de Division Locale, mais accueillera la Cour d’Appel et le Greffe. Un règlement de procédure permettra l’obtention d’une audience finale sur les questions de contrefaçon et de validité dans un (ambitieux) délai d’un an.
Un breveté pourra donc faire respecter son brevet sur l’ensemble du territoire des Etats participants via une seule action devant la JUB. Celle-ci aura compétence exclusive notamment pour les questions de contrefaçon et de nullité des BU mais également des brevets européens classiques. Il sera toutefois possible, pendant une période transitoire initiale de 7 ans, d’avoir toujours recours aux juridictions nationales pour le contentieux des brevets européens classiques, voire de les sortir de la compétence de la JUB par une demande d’opt-out.
BIEN S’INFORMER
Tour de force politique, le « paquet » brevet unitaire entrera en vigueur après ratification par 13 Etats. L’avenir nous dira si le nouveau système obtient les faveurs des utilisateurs.
Le BU offrira une couverture territoriale large pour un coût réduit, en alternative au brevet européen classique (pas de double protection). Toutefois, certains pays, commel’Espagne, ne participent pas. En pratique, un titulaire pourra donc détenir un BU couvrant les Etats de l’UE participants et des brevets européens classiques dans les Etats membres non participants et les autres Etats membres de la Convention sur le Brevet Européen (CBE) hors UE.
En outre, pour certains déposants qui se satisfont d’une protection en France, Allemagne et au Royaume-Uni, le coût de l’annuité unique du BU sera supérieur. D’autant qu’il n’est pas possible de réduire les coûts en abandonnant des pays.
Enfin, si la possibilité de pouvoir obtenir devant la JUB une décision rapide ayant effet à travers l’Europe est séduisante, elle doit être contrebalancée avec le risque d’attaque centrale en nullité, même après la fin de la période d’opposition devant l’OEB.
A ce stade, nous recommandons aux utilisateurs de s’informer sur le nouveau système et de passer en revue leur portefeuille afin de décider, par exemple, de l’opt-out de leurs brevets stratégiques ou de ralentir la procédure d’examen afin d’obtenir l’un des premiers brevets unitaires.